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18.07.25
TRAVAIL DISSIMULE ET DOMMAGES INTERETS SOLLICITES PAR L’URSSAF

(Chambre Criminelle, 20 mai 2025, pourvoi n° 24-81.879)

Voilà quelques précisions bienvenues apportées par la chambre criminelle, s’agissant des dommages intérêts auxquels l’URSSAF peut prétendre lorsqu’elle se constitue partie – civile à l’encontre d’une personne poursuivie pénalement pour travail dissimulé.

L’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale rappelle que les URSSAF ont pour mission de recouvrer certaines cotisations obligatoires, de vérifier l’exhaustivité, la conformité et la cohérence des informations déclarées par les employeurs et de corriger les erreurs ou anomalies affectant le montant des cotisations.

En cas de travail dissimulé, l’URSSAF dispose de procédures « administratives » lui permettant d’établir et de recouvrer les cotisations non versées, y compris en appliquant des pénalités.

Lorsque de surcroit, elle s’associe à la procédure pénale menée contre la même personne pour l’infraction de travail dissimulé, il n’est pas rare qu’elle sollicite des dommages -intérêts complémentaires pour un préjudice moral lié, à raison de la commission de l’infraction, à une entrave à sa mission de service public.

Tout aussi régulièrement, elle réclame la réparation d’un préjudice matériel en lien avec un   prétendu surcoût de fonctionnement pour avoir dû mettre en œuvre la procédure de redressement des cotisations ;

La Cour de cassation rappelle qu’une personne morale de droit public n’est pas fondée à réclamer la réparation du préjudice moral causé par une infraction si ce préjudice se confond avec le trouble social que répare l’exercice de l’action publique menée par le Parquet (Crim., 15 novembre 2023, pourvoi n° 22-82.826).

La règle est étendue aux URSSAF, personnes morales de droit privé mais chargées d’une mission de service public et disposant de prérogatives de puissance publique.

En clair, le préjudice moral dont se prévaut alors l’URSSAF n’est pas le sien : il s’agit du préjudice porté à l’intérêt général que répare l’action publique engagée par le parquet pour obtenir une condamnation pénale.

Il n’y a pas lieu d’indemniser l’URSSAF à ce titre et seuls des éléments particuliers à l’affaire traitée pourraient permettre, éventuellement, de distinguer un préjudice moral réparable propre à l’URSSAF.

La lecture est aussi stricte s’agissant d’indemniser l’URSSAF d’un préjudice matériel : le seul fait d’avoir dû mettre en œuvre la procédure de redressement des cotisations n’est pas générateur d’un préjudice puisque c’est la mission donnée par la loi aux URSSAF.

L’URSSAF « ne fait alors que son travail ».

Si elle entend prétendre à un préjudice matériel à ce titre, il lui faudra démontrer l’existence de surcoûts de gestion liés à la mise en œuvre de la procédure de redressement pour travail dissimulé, surcouts qui excèderaient la charge normale de vérification de l’exactitude des déclarations sociales qui, là encore, fait partie de ses tâches dévolues par la loi.

Par analogie, on imagine, en effet, assez mal un service de police ou de gendarmerie solliciter des dommages intérêts dans chaque affaire pénale en soutenant que la commission d’une infraction lui cause un préjudice moral dès lors qu’il est en charge d’assurer l’ordre et la sécurité sur son territoire, lesquels sont effectivement troublés par la commission de l’infraction  ; que par ailleurs, le fait d’employer ses personnels à la recherche des éléments de  l’infraction et de son auteur lui cause un préjudice matériel.

Comparaison n’est pas raison mais y a-t-il préjudice, sauf circonstances particulières, à assumer la mission dévolue par la loi ?

Ainsi, il est impératif de passer les demandes financières des URSSAF, partie civiles, au tamis de ces critères restrictifs.

Eugène BANGOURA

Avocat Associé, spécialiste en droit pénal

 

 

 

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22.08.24
Le salarié ayant moins d’un an d’ancienneté a droit à indemnisation en cas de licenciement abusif

L’arrêt (Cass. Soc., 12 juin 2024, n° 23-11.825)

Le barème dit « Macron » a limité l’indemnisation des salariés licenciés sans cause réelle et sérieuse.

Il se présente sous la forme de deux tableaux selon que l’entreprise compte au moins ou moins de 11 salariés.

Or, ces tableaux faisaient état, s’agissant du salarié dont l’ancienneté dans l’entreprise est inférieure à une année, de la mention « sans objet » dans la case « indemnité minimale ».

Était-ce à dire que ce salarié ne pouvait prétendre à une indemnité même s’il était licencié sans cause réelle et sérieuse ?

C’est ce qu’avait retenu la Cour d’appel dans cette affaire.

La Cour de cassation a cassé cet arrêt au visa de l’article L. 1235-3 du Code du travail qui prévoit un montant maximal d’indemnité d’un mois de salaire pour le salarié dont l’ancienneté dans l’entreprise est inférieure à une année.

Dès lors, il appartient aux juridictions prud’homales, qui doivent appliquer le barème MACRON, d’allouer au salarié ayant moins d’un an d’ancienneté licencié de façon abusive une indemnisation qui ne pourra néanmoins excéder un mois de salaire.

 

Un conseil ?

Un salarié disposant d’une faible ancienneté pourrait être tenté, au vu du barème MACRON, de renoncer à contester son licenciement abusif estimant l’indemnisation maximale qu’il est susceptible d’obtenir peu satisfaisante.

L’avocat peut, particulièrement dans cette situation, accompagner les parties dans le cadre d’une démarche amiable, moins contraignante et moins coûteuse, pour tenter de parvenir à un accord en dehors d’un cadre judiciaire.

 

Par Cathie LAVAL, Avocat associé – droit du travail

 

 

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26.03.24
Surendettement et prescription

L’ouverture d’une procédure de surendettement peut suspendre la prescription

Cass. Com., 8 février 2024, n°23-17.744

Un emprunteur bénéficie d’une procédure de surendettement. Le créancier, titulaire d’un titre exécutoire en la forme notariée, ne peut alors procéder à l’exécution forcée aux fins d’obtenir le paiement des sommes qui lui sont dues.

Le juge a considéré que le créancier, pouvant assigner en paiement pour obtenir un jugement et ne l’ayant pas fait, la prescription de l’action en recouvrement était acquise.

Tel n’est pas l’avis de la Cour de cassation qui indique expressément qu’il ne saurait être imposé au créancier, empêché d’agir en exécution forcée par la loi, d’introduire une action au fond pour suspendre la prescription.

Ainsi la décision ouvrant au profit d’un particulier une procédure de surendettement suspend la prescription de l’action en recouvrement pour le créancier titulaire d’un titre exécutoire, quelle qu’en soit sa nature.

 

Par Aurore THUMERELLE, Avocat associé – Droit bancaire

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14.03.24
Le paiement des dettes sociales par les associés

L’ouverture d’une liquidation judiciaire : seconde chance pour le créancier d’obtenir des associés le règlement des dettes d’une société civile

Cass. Civ. 3ème, 18 janvier 2024, n°22-19.472

Un créancier agit à l’encontre des associés d’une société civile immobilière pour obtenir le paiement des dettes sociales. Ses demandes sont rejetées, le juge considérant qu’il ne justifie pas avoir vainement tenté d’obtenir le paiement auprès de la société.

La société est ensuite placée en liquidation judiciaire et le créancier déclare sa créance.

La jurisprudence considérant que, dans cette hypothèse, il est inutile de justifier de vaines poursuites, le créancier engage une nouvelle procédure à l’encontre des associés. Ces derniers se prévalent alors de l’autorité de chose jugée de la décision précédente et obtiennent gain de cause devant la cour d’appel qui rejette la demande en paiement.

La Cour de cassation casse l’arrêt, considérant que l’ouverture de la liquidation judiciaire constitue un évènement nouveau permettant au créancier d’agir à l’encontre des associés de la société civile sans que ces derniers ne puissent lui opposer l’autorité de chose jugée d’une décision rendue préalablement à l’ouverture de la procédure collective.

Face à la difficulté de démontrer les vaines poursuites mises en œuvre à l’encontre d’une société, l’ouverture de la liquidation judiciaire constitue une solution.

Par Aurore THUMERELLE, Avocat associé – Droit bancaire et procédure collectives

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